Le maréchal-ferrant
Les Grecs ne connaissaient pas le fer à cheval : l'historien antique Xénophon (Ve siècle avant J.C.) ne mentionne que l'embataï, qui serait une sorte de sandale de cuir lacé aux pieds de certains chevaux afin de les protéger dans les terrains marécageux ou empierrés.
Les Romains utilisaient l'hipposandale : des lanières de cuir maintenaient en place des plaques métalliques dont les bords étaient relevés de façon à épouser les bords du sabot du cheval. Surtout retrouvées en Gaule, Germanie et Bretagne, elles ne servaient en fait qu'aux chevaux de trait ou à ceux au pied malade. C'est vers le début du Moyen Âge que le fer cloué apparaît en Europe Occidentale, dérivant sans doute de l'hipposandale qu'il remplace peu à peu.
L'on peut considérer que son usage s'est généralisé au XIIe siècle, le terme de maréchal-ferrant date d’ailleurs de cette époque; mais son évolution continue encore jusqu'à nos jours. Très lente d'abord, elle débute vraiment au XVIe siècle avec l'apparition du pinçon : mais le fer est encore posé à froid. Sont alors écrits les premiers traités de maréchalerie : en 1664, « Le Parfait Maréchal » de Solleysel, considéré comme le père de la maréchalerie française, décrit certains éléments qui ne changent guère jusqu'à nos jours.
Au XIXe siècle, l'évolution des connaissances vétérinaires permet de perfectionner encore les techniques, et les fers orthopédiques deviennent de plus en plus complexes : elle culmine au XXe siècle dans les écoles vétérinaires et à l'Ecole de la Maréchalerie de Saumur. C'est aussi l'apparition des matières synthétiques : caoutchouc et polyuréthane pour les semelles, résine et fibre de verre pour consolider les sabots, fers en aluminium et même en titane.
Les outils du maréchal-ferrant
Le feu de la forge et le martèlement du marteau sur l'enclume accompagnent constamment le maréchal dans son travail. Car il adapte chaque fer qu'il fabrique au pied du cheval qu'il "chausse" ! La caractéristique du cheval est, en effet, qu'il court sur un doigt et que le sabot en est l'ongle : cet appui est extrêmement fragile et tout l'art du maréchal consiste à le maintenir dans le meilleur état possible, éventuellement même à corriger un défaut ou à soigner une maladie par un ferrage orthopédique. (L’évolution de cet animal est d'ailleurs telle que, selon les paléontologues, le cheval ferait aujourd'hui partie des races en péril si l'homme ne l'avait pas domestiqué et soigné.)
Les centres d'activité de la forge se répartissent par rapport au feu : le foyer, les enclumes et le bassin d'eau forment l'îlot principal.
Le charbon de forge utilisé est une houille grasse de petit calibre : on l'allume avec une poignée de paille ou de copeaux; et la fumée, très importante à l'allumage, est canalisée vers la cheminée par une hotte en tôle qui surplombe les foyers.
C'est aux alentours de 1000° (de rouge cerise à orange foncé) que l'on forge le fer sur l'enclume.
Le travail
Le plus souvent, le ferrage s'effectue librement avec un animal docile. Pour les animaux plus difficiles, le maréchal-ferrant utilise le travail. Sans constituer réellement un outil, le travail, aussi appelé "travail à ferrer", est un bâti dans lequel le cheval est entravé à l'aide de sangles. Cet outil est utilisé pour les chevaux de trait, dont les pieds seraient trop lourds à porter par un homme.
Lorsque le cheval est ferré librement, deux méthodes sont possibles :
- La ferrure à l’anglaise : le maréchal-ferrant, tout seul, tient le pied entre ses genoux et ajuste le fer avec ses bras (méthode physiquement très éprouvante mais facile à mettre en œuvre)
- La ferrure à la française : un aide tient le pied du cheval tandis que le maréchal-ferrant ne réalise que l’ajustage et la pose du fer.
La mailloche est l’outil principal du maréchal ou du forgeron.
Le brochoir sert à arracher les vieux clous du fer et à enfoncer les nouveaux.
La tricoise est la tenaille du maréchal.
Le rogne-pied sert à parer le sabot, c'est à dire à couper la corne en excédent.
La râpe possède une face taillée en lime pour travailler le métal et l'autre taillée en râpe pour râper la corne du sabot.
Comment ferre-t-on un cheval ?
Le premier travail est d'enlever l'ancien fer. Pour cela le maréchal-ferrant utilise les tricoises, sortes de tenailles à long manche. Ensuite l'excédent de corne est enlevé avec le boutoir et le "rogne-pied", outils formés d'une lame, en s'aidant de la mailloche qui est le marteau typique du maréchal-ferrant (aussi appelé brochoir ou marteau à ferrer). Pour terminer le parage du sabot, le dessous est nettoyé avec la rainette et les côtés limés avec la râpe.
Pendant ce temps, le fer chauffe dans la forge ; il est à la bonne température lorsqu'il devient d'un rouge soutenu. Le maréchal-ferrant l'ajuste alors sur le sabot, opération caractérisée par l'odeur de la corne brûlée. Au besoin, le fer est ajusté, puis, il est mis en place et broché avec des clous à tête carrée. Il faut enfoncer les clous sans blesser le cheval. Les pointes des clous sont ensuite coupées et la partie restante repliée dans le sabot. Un dernier coup de râpe pour la finition.
Il faut compter environ 20 minutes par fer. Lorsque l'ouvrage est terminé, le maréchal-ferrant regarde toujours le cheval partir pour s'assurer que le travail est correct.